sur le chemin d`Orccha: regards sur l`Inde
Depart de Gwalior pour Orccha hier matin par le Bhopal Shatabdi qui est decidement tres agreable. Dans le train deja, a la vue des champs et des collines vierges, des animaux en harmonie avec leur mileu naturel, on se sent mieux. Nous debarquons a Jhansi ou un chauffeur nous aborde d`emblee et ne nous lachera pas d`une semelle, d`un orteil meme... jusqu`a ce qu`on se sauve a bord d`un tempo. OUF! il etait temps (ooooh)...
Le tempo, ah le tempo! c`est une sorte d`autorickshaw collectif: a peine plus grand mais beaucoup plus...collectif. Imaginons un peu le tableau: Donc: vous prenez un vieille moto trois roues, vous y mettez dessus une petite cahute de tole, deux banquettes se faisant face et vous y faites rentrer...roulements de tambour...19 personnes! (14 adultes/5enfants + nos deux gros sacs de voyage):
La taille d`une boite de yaourt mais la contenance d`un bus .
A l`interieur, une famille magnifique qui pose sur nous des yeux eberlues: Mais que font ces etranges personnages tout blancs dans cet endroit?
La maman est d`une extreme beaute; loin des canons europeens ou mondiaux mais tellement plus belle. Elle semble d`un milieu modeste, n`est pas mise en valeur par de quelconques artifices. Elle est tout simplement superbe. Lui donner un age serait difficile. Elle a un immense sourire laissant eclater des dents d`une extreme blancheur; sa peau est tres foncee et ses yeux couleur roux miel. Son regard est intense.
Elle est accompagnee de 4 enfants qui lui ressemblent tous et sont d`une beaute a couper le souffle. Il sont tres serieux et semblent en retour assez subjugues par nous. Leur regard est percant, d`une grande force compares a leurs visages si delicats. Et de ce contraste nait la beaute. Nous sommes sous le charme, et moi tellement sous le charme que je les observe a la derobee de peur de les offenser par un regard trop appuye. Je creve d`envie de les prendre en photo mais je n`ose pas. Nous echangeons pourtant des sourires ou des regards complices avec la maman. Et pourtant... je n`ose pas, trop intimidee.
Cette famille est un exemple de la beaute des indiens, et nous serions tentes de preciser surtout des femmes et des enfants. Les regards sont souvent tres intenses, accentues parfois par le khol que les meres mettent autour des yeux des enfants en tres bas age ou des bebes. La premiere fois, c`est surprenant de voir un nourrisson maquille, les yeux cernes de noir.
Ils sont tres eveilles tous ces enfants. Certains n`ont pas plus de 5 ans et se promenent seuls traversant des routes que nous memes avons du mal a franchir a cause de la circulation. Ici en Inde, pas de code de la route. C`est la loi du "plus fort, plus rapide, plus bruyant" Il nous faut etre vigilant. C`est ce qui rend ces enfants encore plus debrouillards a nos yeux. Certains -beaucoup- travaillent des le plus jeune age. Je pense a ce garcon de 10 ans qui transporte de gros bidons d`eau derriere son velo pour les livrer dans les hotels, je pense a cette petite fille de 8 ans environ qui porte sur sa tete un gros tas de bois, ou ces pre-adolescents employes par les restaurants pour de menues taches. "debrouillards", "eveilles" les termes ne sont pas justes, ils ne collent pas car ces enfants n`ont pas le choix. Nous devrions dire "pousses" "projetes", forces de survivre, obliges de`exister et d`avancer dans une vie qui ne les menage en rien.
Et nous dans tout ca, comment sommes-nous vus? Comme des betes curieuses detentrices d`un pouvoir economique qu`eux n`ont pas. Pour les plus pauvres, un moyen de gagner quelques roupies, pour les autres une reelle source de curiosite. Ici nous sommes l`exotisme, ici nous sommes la difference. C`est etrange de se retrouver dans cette position et c`est instructif. Cela nous remet a notre place, nous les etrangers. Beaucoup nous devisagent longuement, certains se postent devant nous et nous fixent inlassablement jusqu`a nous mettre mal a l`aise.
Les exemples sont nombreux: A la gare d` Agra, nous attendons le train lorsqu`un groupe de jeunes s`approche et nous fixe. Ils semblent discuter de nous. L`un d`eux degaine son portable, le colle sous notre nez et nous prend en gros plan. Surprise. Amusement. Puis il recommence, un autre gros plan, individuel, plus pres encore, comme si nous n`etions pas la... et encore,la il nous mitraille. Nous finissons par partir, passablement agaces, et tres mal a l`aise.
Comment se sentent-ils eux, quand les touristes se permettent de les photographier sans leur demander leur avis?
Nous avons la reponse: reduits a l`etat d`objet, deshumanises.
Lorsqu`on demande la permission, alors la sensation est differente, plus agreable, on se sent flatte. Nous preferons demander, et nous preferons qu`on nous demande. Comme cet homme rencontre a Gwalior dans le palais de la citadelle. Il s`approche de moi, me tend la main avec un air tres solennel et me demande d`ou je viens sans me quitter des yeux...jusqu`a ce qu`il voie Kris. La il lui tend la main, lui demande son prenom, et nous dit d`un ton determine comme si c`etait vital pour lui: "I WANT a picture with you!" Qu`a cela ne tienne! nous voila en train de poser pour la enieme fois. C`est une rencontre sympa qui se poursuit par une visite commune des lieux avec des echanges d`impressions , de regards et quelques reponses a des questions que nous nous posons sur nos pays respectifs. Lui et ses compagnons de voyage viennent du sud de l`inde. Ils ont l`air d`un milieu social aise . Le contraste entre eux (avec qui nous nouons un rapport asez equilibre) et les enfants ou les personnes que nous croisons est grand. Eux possedent un appareil numerique, parlent un anglais plus que correct tandis que les autres ont les yeux rives sur nos appareils, source de facination, a l`instar de nos blancs visages. et ils sont dans l`incapacite de communiquer...
Reste le regard, si important et si pregnant , ces grands regards qui nous interrogent et qui veulent tout dire.
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